vendredi 27 mars 2020

Jour 11


1000 morts hier en Italie. Ils sont à 9000 en un mois, soit l’équivalent d’une saison entière de grippe en France. La contagion ralentit, c’est toujours ça. Chez nous ça s’accélère, 365 morts hier.

Notre jeune cousine fait des gardes à Madrid, dans une combinaison en papier fripé blanc, avec un masque de soudeur sur un masque de canard et des gants qui collent. On ne voit plus que ses yeux limpides. Quatre-vingts personnes attendent un lit depuis deux jours. Elle reste espiègle et fait des selfies, respect.

On parle de plus en plus d’économie. On va perdre trois points de croissance, c’est une catastrophe Thérèse. Plans de relance de milliards de milliards de kopecks.
Les Etats européens se déchirent sur les questions financières, encore une fois, radins contre irresponsables.

= Déviation =

Y a un truc qui m’énerve, c’est quand on tombe amoureux du flacon, alors que l’important c’est l’ivresse. On n’a que le PIB à la bouche, alors que ce qui compte c’est l’état d’un groupe d’humains. C’est comme si la météo ne parlait que du taux d’humidité dans l’air.
Le PIB, je ne veux plus en entendre parler et quand est-ce qu’on construit un système qui ne déchire pas d’humain et d’environnement ? Le développement durable c’est pas pour les chiens.
Mais honnêtement l’économie c’est super compliqué. On ne comprend pas grand-chose et on maitrise encore moins. Quand j’avais vingt ans, on m’a enseigné que tout acteur économique est un être rationnel qui cherche à maximiser son profit. C’est encore plus con que l’accord du participe passé, faut le faire. J’ai mis l’économie à la poubelle et j’ai eu 4 à la fin.
Mais l’économie m’a beaucoup fait avancer sur le plan personnel : elle m’a appris à douter de l’autorité.
J’ai une proposition : l’économie c’est comme un biotope. C’est un fatras d’acteurs différents avec leurs propres logiques, qui dépendent les uns des autres dans tous les sens. Je propose d’étudier l’économie selon une approche biosystémique, peut-être qu’on avancera un peu.

= Fin de déviation =

Je suis pibophobe. Mais apparemment ça commence à chauffer. Malgré mon dégout pour l’économie, je dois prendre acte qu’il y a d’un coup trois millions de chômeurs aux Etats-Unis et que ça va concerner tout le monde. Les premiers à morfler étant toujours les plus pauvres, les moins formés etc., ça promet encore d’émouvantes scènes d’égalité des chances. Pour ceux qui ne seront pas morts dans une poubelle à Bombay.

Dans le square en face, deux petits enfants se transforment en minotaures et hurlent comme des minotaures. Alternative appelée à se répandre : hurler ou péter les plombs. Les psys appellent ça décompenser. Je comprends pas mais j’aime bien, ça me fait penser à une explosion de chaudière.

Les bourgeons de l’arbre des voisins débourrent. J’aime bien ce mot-là aussi. Ils n’écoutent que l’élan indomptable de la vie et se foutent de notre pandémie, ces sacrés loustics.

Ma fille a un devoir à faire sur un auteur pas engagé. Je lui dis moi, elle fait mmh, je lui dis Proust. Il est engagé dans la contemplation des madeleines épongeant le thé, ce n’est pas un sujet de société.
Est-ce que râler constitue un engagement ? En manif, quand on passe à la télé, quand on va à New-York en voilier. S’engager, c’est faire ou c’est dire ?



4 commentaires:

  1. Une question si vous m'écoutez : faut-il garder la déviation ou est-ce vraiment trop hors sujet ? Merci !

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  2. Ya plus dtiming mon ptit joseph.
    Mettez vos pantoufles
    Deviation indispensable a mon gout
    Maximisez qu ils disaient.
    "si tu fais pas +15% par an c est pas bon."
    Voila ltravail....

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  3. Ha ! Merci pour le retour <3 (ça veut dire coeur)
    On est bien d'accord sur le fond.

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