jeudi 10 octobre 2013

Lontemps, je me suis couché tard.

       Longtemps, je me suis couché tard. J'ai toujours craint le crépuscule, cette heure sourde où tout bascule. Plus rien n'est ce qu'il semble être habituellement, ce qui était familier devient étranger.
       Aussi, dès le déclin de l'après-midi, je cessais toute activité pour me plonger dans un bain brûlant, proche de m'ébouillanter, avec un prix Nobel de littérature. Contre les kriss de l'angoisse je brandissais un bouclier de papier.
        C'était vain. Quoi que je fisse, la tombée de la nuit me sautait à la gorge comme un carnassier. Entre chien et loup, je sentais toujours les mêmes crocs dans ma chair.
        Plus tard, je commençai à boire. Avec mon Nobel je m'envoyais un grand cognac sans âge. Ainsi chauffé du dehors comme du dedans, je ramollissais ma carcasse et passais, tant bien que mal, le seuil fatidique de la nuit.
        Une fois entré, je m'y sentais si bien que je voulais qu'elle n'eût pas de fin. Je me perdais dans des fêtes éblouissantes. Mais l'aube finissait toujours par arriver et, de toute sa beauté, elle me signifiait avec limpidité que j'avais encore brûlé mon temps en vain et que les vapeurs de l'ivresse ne comblent pas la vacuité d'une vie.
        C'est quand je suis mort que ça a commencé à aller mieux.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire