Mon cousin a reçu son passeport. Il
peut enfin retourner gagner sa croute. Moi je suis toujours payé mais je reste
coincé à la maison. J’ai fini tous les sudokus d’internet, j’ai vu tous les
morts de Game of Thrones, j’ai assemblé tous les chasseurs impériaux des lego Starwars.
J’ai fait le tour du confinement. J’en peux plus.
Je donnerai la moitié de mes
cravates pour une réunion d’équipe, celles qui servent à rien, qui font dormir
à n’importe quelle heure de la journée. J’ai besoin de me sentir vivant.
Alors je pars en
chasse. Je remplis mon attestation, tiens première nécessité c’est ça.
Je sors. J’ai bien
réfléchi : où est-ce qu’on trouve le plus de virus ? A l’hôpital. Mais
là ils ne me laisseront pas faire le mariole, ça va être surprotégé. Le mieux,
c’est le supermarché. C’est là que les gens se croisent maintenant.
Je fais la queue
à rallonge, je finis par entrer. Le pousse-truc de gel me fait de l’œil à l’entrée
mais je l’ignore évidemment. Une fois dedans, je respire à pleins poumons. Je
pousse l’odeur de vague pourri-javel jusqu’au fond de mes bronches et je
retiens ma respiration quatre secondes comme dans mon appli de méditation.
J’arpente les
rayons. Ça fait trois fois que je passe entre les conserves. J’en prends une, un
peu en-dessous du niveau des yeux, c’est celles que les gens tripotent le plus.
Personne autour, je la lèche discrètement.
Ah oui, le riz. Le
rayon est toujours vide, c’est que tout le monde a pris son paquet. Je passe la
main soigneusement sur toute la longueur du rayon, avec rigueur sur chaque
étagère. Quand j’arrive au bout, je me frotte les mains et me suce les doigts
un par un. C’est pas très bon mais il faut ce qu’il faut.
Ça fait trois
fois que le type de la sécu passe au bout de l’allée, je dois commencer à être
louche. J’essaie de le semer au rayon des apéros. Je cherche la Suze : il
parait que les vieux sont plus vulnérables. Je trouve une bouteille, je la
frotte consciencieusement comme la lampe du génie. Je la repose et me passe les
mains sur le visage. Tant que j’y suis, je me mets un doigt dans le nez. Puis deux.
Le type de la
sécu est encore là et me regarde fixement. Il est temps de s’éclipser. Je vais
prendre mes yaourts et je passe à la caisse.
A la sortie, le
punk à chien habituel me demande une pièce. Je m’apprête à répondre non quand
je vois qu’il plisse les yeux. J’ai tout juste le temps de m’agenouiller pour attraper
son éternument en plein visage.
Ahahahah ! On a hâte de savoir si ça a marché maintenant ! On espère que non cependant, vous n’auriez certainement plus la force d’écrire... ou au contraire ce serait une nouvelle source d’inspiration.
RépondreSupprimerMerci aussi pour la revue de presse.
:D
SupprimerRéponse ce soir.
On se demande : attendre ou aller au front
RépondreSupprimerVotre kamikaze est attachant
Et toujours la même envie de vous lire chaque matin
C'est motivant ! Merci.
SupprimerIl s'emmerde, et c'est ça le pire pour un kamikaze : c'est comme ça que ça finit mal, parce qu'on a envie qu'il se passe juste quelque chose.
Il parait qu il faut sucer les pieces de monnaie comme un bonbon a la mente.
RépondreSupprimerQuelle merveilleuse idée ! Je n'y avais pas pensé.
SupprimerJH