Le 11 mai, on commence à lâcher les
fauves. L’appli de traçage des contacts est prête, conforme aux exigences
européennes sur la vie privée des humains et de leurs portables. Des quantités
astronomiques de tests sont à disposition, on peut en faire à l’hôpital, chez
son médecin, à la boulangerie, sous la douche.
Certaines écoles rouvrent en
demi-classes, dans l’espoir de rattraper les troupeaux de décrocheurs qui se
sont cristallisés sous confinement. Certains retournent au boulot aussi, prétextant
qu’ils ne sont pas télétravaillables, c’est mal de mentir à la Nation.
Comme on s’y attendait, on repère
des cas. Poum la procédure : en quatorzaine, on active l’appli et on
contacte les portables qui se sont frottés au portable atteint. On tombe
classiquement sur les conjoints, les voisins-voisines mais il y a aussi des
choses bizarres : beaucoup de gens très éloignés, à Bourges, Saragosse ou même
Ispahan. On interroge les souffrants, qui malgré leur fièvre sont catégoriques :
ils ne sont jamais allés à Ispahan, d’ailleurs c’est où.
Et puis ces contacts sont
impossibles, le monde entier est fermé. Les ingénieurs se grattent la tête. On
fait les tests d’usage, sans succès. On essaie par ci, comme ça, rebelote. Finalement
une armée d’Indiens sous-payés relit une à une les 700 000 lignes de code
de l’appli, sans trouver non plus.
Mais un jour, à force de se racler
le cortex, on se rend compte que la version bêta a été virussée avant même de partir
en test. On s’acharne à extraire le microbe, sans succès, il est insaisissable.
Parfois il est là mais ne fait rien, parfois il dérègle tout, au point même de
faire fondre l’écran. Les ingénieurs s’irritent, ça cherche et ça gratte, ça dure
des semaines. Tout le monde en a marre. Les Indiens raccrochent au nez.
Finalement l’Europe, la honte, se
résout à adopter l’appli de Google et Apple amis pour la vie. Et le monde passe à
côté de l’algorithme parfait qui vous trouve l’âme-sœur à coup sûr.
Aux dernieres news, faut pas aller chercher plus loin. Tout se passe entre les intestins des vieux et le ptit virus tres interessé de ce qu il y trouve a grignotter.
RépondreSupprimerC'est vrai ? Si tu as un article sur le sujet, ça m'intéresse. J'adore l'intestin.
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