Les
putes on voit leurs jambes on voit leurs fesses on voit leurs cheveux
tout ce qu'elles veulent c'est s'en faire mettre un maximum les
putes, les porcs ils regardent ils zyeutent ils bavent ça se mélange
ça se cause ça se cligne ça se frotte ça se pelote ça se prend
c'est immonde c'est blasphématoire chacun sa
place les femelles avec les femelles les mâles avec les mâles c'est
la nature il faut être vertueux il faut être pur il faut être
droit il faut être dur, il faut tuer les corps et les élans :
pour tous Dieu est le seul but et le seul étalon.
samedi 19 décembre 2015
lundi 14 décembre 2015
dimanche 6 décembre 2015
dimanche 29 novembre 2015
Démonstration 16 - Le 22 novembre 2015
Ben
voilà. Je pose mes fesses dans le train du retour. On est encore
gare Montparnasse, ça démarre dans dix minutes. Je ne suis pas
mort. Je n’ai pas vu de morts. Je n’ai vu personne pleurer.
Je
suis passé devant La Belle équipe, un des bars qui ont été
mitraillés, rue de Charonne. Je n’ai pas fait exprès, c’était
sur mon chemin. J’ai fait des kilomètres à pied dans Paris, pour
profiter de la ville, et parce que ça m’apaise.
Devant
La Belle équipe, il y avait plein de fleurs et de bougies, ça
faisait un grand tapis sur le trottoir. Il y avait une cinquantaine
de personnes qui regardaient. Quelques-unes causaient doucement. Je
n’ai vu personne pleurer, il faut dire que je n’ai pas bien
regardé, j’avais moi-même les larmes aux yeux. J’ai croisé
quelques visages malgré tout, j’ai vu que les gens étaient
touchés, presque recueillis. Pas de démonstration bruyante. Comment
fait-on pour digérer ça quand on n’est pas croyant ? J’ai
continué mon chemin.
Je
suis allé jusqu’au Jardin des plantes, puis les quais vers
Notre-Dame. J’ai obliqué à gauche, vers la montagne
Saint-Geneviève, au sommet de la colline j’ai trouvé la librairie
que je cherchais, je suis redescendu à Saint-Sulpice. En passant
devant le Sénat, je me suis dit que c’était idiot de passer
devant le Sénat. Il ne s’est rien passé, j’ai juste vu quelques
grosses voitures avec un gyrophare sur le toit. Transport de
sénateurs sans doute.
A
Saint-Sulpice, tout était normal. Concert dans l’église, vieilles
dames. On est allés dans un bar à côté avec mes potes. Je n’ai
rien trouvé d’inhabituel, il y avait du monde. Eux m’ont dit que
d’habitude il y a plus de monde. De mon côté, je me faisais des
petites remarques du genre je préférerais m’installer au fond ou
bon endroit pour une fusillade. Mais pas de fusillade. J’ai mangé
une andouillette et bu deux pintes de brune. On a rigolé avec les
copains en disant que c’était de la provocation. On a aussi fumé
des clopes.
Pas
de marque visible des attentats dans Paris. La présence policière
n’est pas exceptionnelle. Seul signe frappant : seulement
quatre personnes devant la fontaine Saint-Michel samedi soir. Jamais
vu ça. Ça reviendra, sans doute.
Maintenant
la lune se lève, après une belle journée. Ma petite parano me
souffle qu’après ce trajet en train, quand je serai sorti de la
gare, je serai hors de danger. Mais après deux jours dans Paris, je
n’y crois plus : Panthéon, Saint-Michel, le métro, les
gares, et rien.
Jusqu’ici
tout va bien. On attend le coup suivant, en espérant qu’il ne
tombe pas sur nous.
mercredi 25 novembre 2015
Démonstration 15 - Encore le 20 novembre 2015
Qu’est-ce qui va
se passer maintenant ? Je vais passer mon week-end à Paris
comme prévu, je vais marcher dans les rues avec ma sœur, j’irai
probablement à République voir les bougies et les papiers
détrempés. J’ai envie de voir ça, je ne sais pas bien pourquoi.
Je n’ai pas été à République depuis des années. Je me souviens
du 1er mai 2002, Le Pen au second tour de la
présidentielle. Pour la manif, j’avais fait un petit panneau
Liberté Egalité Fraternité. Dans ces moments-là, c’est
le seul symbole national auquel j’adhère vraiment. Je n’ai rien
contre le drapeau bleu blanc rouge, je ne le trouve pas très beau,
c’est tout. Par contre je ne chante pas la Marseillaise, c’est un
chant de haine. Je ne l’ai pas chantée cette fois-ci non plus.
Le 1er
mai 2002, on était venu contre la haine, déjà. La haine, toujours.
L’humain la porte en lui. Ça doit faire partie de la panoplie de
l’évolution, quelque chose en lien avec le groupe. Peut-être que
notre survie est liée au groupe, donc si on l’aime ça augmente
nos chances de survie. La haine des autres serait alors un effet
collatéral de notre amour du groupe. Une sorte de dérapage, un
mauvais dosage, un négatif.
Jusqu’ici tout va
bien. Le train roule, personne n’a tiré, pas de bombe atomique, ni
d’attaque de fourmis géantes carnivores. Mon imagination anxieuse
s’éclate dans cette période post-attentats.
J’essaie de
réfléchir malgré tout. J’ai mis ce matin sur internet un texte
où j’essaie de comprendre certains ressorts des attentats. Comment
on en vient à massacrer des gens, en se tuant soi-même aussi ?
Je m’étais déjà posé cette question après le 11 septembre. Je
tombe sur une réponse simple : du désespoir et de mauvaises
rencontres. Les solutions par contre sont compliquées : il faut
changer de société. Donner du sens à la vie en sortant de la
consommation, renouer les liens sociaux, redonner de l’espoir et de
la chaleur humaine, pour que chacun ait l’impression d’appartenir
à un groupe.
On pourra m’accuser
de dire que les attentats c’est la faute au capitalisme. En quelque
sorte, oui. L’égoïsme, l’isolement généralisé, le sentiment
de cul-de-sac. On pourra m’accuser de faire de l’angélisme, de
tout mélanger. Mais tout est déjà mélangé. Et profondément je
ne crois pas qu’on naisse monstre.
Le jour a l’air de
vouloir se lever. J’ai toujours été surpris de voir que, lors des
grandes catastrophes, la Terre continue de tourner. Quand mon cousin
est mort dans un accident de voiture, j’étais stupéfait de voir
les bus circuler normalement dans Paris. Et à l’heure où tous ces
gens mouraient la semaine dernière, on prenait l’apéro chez nos
voisins. On n’a rien senti.
Là je me dis que ce
genre de choses arrive quotidiennement en Syrie, en Irak, au Yémen.
On ne sent jamais rien mais on ne s’en étonne pas d’habitude.
Parce qu’on n’est pas touché, au fond. D’un coup ces horreurs
arrivent en bas de chez nous et elles deviennent horribles. Pourquoi
pleurer aujourd’hui, alors que je ne connaissais aucune victime, et
pas à l’heure de chaque violence, de chaque massacre, jour et
nuit ? On ne peut pas vivre en pensant constamment à la douleur
du monde. Ça ne fait pas de nous des monstres mais ça ne nous
dédouane pas. On devrait s’en préoccuper. Cela dit, honnêtement,
j’en ai marre de me préoccuper tout seul. Je donne de l’argent
aux associations, oui mais il reste tant de merde à pelleter. Je
finis par devenir un râleur. Est-ce que râler ce n’est pas un
constat d’échec, le bruit de l’impuissance à arrêter la
souffrance ?
Il pleut. Ça fait
une semaine qu’il pleut. Non non, le ciel se fout bien de nos
malheurs, c’est juste une perturbation atmosphérique. Le ciel
c’est une vue panoramique sur le vide. C’est pas facile de rester
rationnel en ce moment.
lundi 23 novembre 2015
Démonstration 14 - Le 20 novembre 2015
Je prends le train pour Paris. 7 h 30, il fait nuit noire. Thierry
notre chef de bord nous souhaite la bienvenue. Suite à un rail cassé en gare du
Mans, le TGV sera détourné par St-Pierre-des-Corps. C’est mieux qu’une bombe.
Le déplacement est prévu depuis trois semaines, puis vendredi dernier
il y a eu les attentats. Alors j’ai peur. Je vais à la gare, premier lieu de
danger. Puis je suis dans le train, deuxième lieu de danger, je repense à
l’attentat raté du Thalys il y a six mois. Cent fois j’ai visualisé la scène où
je saute sur le terroriste au sortir des toilettes, je détourne son arme mais
le coup part quand même. Qui le prend ? Moi ? Une femme à côté ?
J’arrive à Montparnasse, j’imagine des scènes de panique. Je prends le métro,
prise d’otages, égorgement. J’arrive à ma réunion, à Charonne dans le XIe, à
deux rues des terrasses mitraillées la semaine dernière. Une fois dans la salle
de réunion, je respire. Passé un premier tunnel de danger.
Je me dis que je suis idiot. Combien de personnes ont pris le train
depuis une semaine ? Combien le métro ? Combien sont passées à
Montparnasse ? Des millions. Une prof de ma fille a dit à la classe que
130 personnes sont mortes la semaine dernière. Rapporté à 65 millions, on a
autant de chances d’y passer que de gagner au loto. N’empêche, le traumatisme
est là. Nous portons tous à l’esprit une marque féroce, l’âme comme broyée en
un lieu intime, en pulpe douloureuse.
Depuis une semaine, chaque matin j’embrasse mes enfants avec soin. Je
sais que c’est irrationnel, qu’il y a très peu de chances qu’un malheur arrive
mais c’est plus fort que moi. Je me dis qu’on ne peut pas écarter le scénario
d’un fou qui entre dans l’école et tire dans le tas. C’est déjà arrivé. Au
moins je les aurai embrassés comme il faut avant de les perdre.
Ces jours-ci, je crains plus les actes isolés, les
fous, les paumés, qui se lâchent en se réclamant vaguement de telle ou telle
secte. Je ne m’attends pas à un autre attentat organisé dans l’immédiat. Ça
reviendra dans quelques mois, quand on aura commencé à oublier et que la vie
aura repris.
On dit partout il faut continuer à vivre, on reste debout. Oui, bien
sûr. La vie continue mais je porte comme tout le monde un pincement constant au
cœur, la peur du pire. Elle se mêle à l’effroi des images de la semaine
dernière, à cette douleur immense. Ça marche bien le terrorisme, ça terrorise.
On parle de courage mais est-ce courageux de continuer à vivre ?
Finalement on ne fait que continuer comme d’habitude. Quelle serait
l’alternative ? Rester chez soi écroulé en pleurs toute la journée ? Ça
n’est pas viable. Notre courage est
juste normal, ça n’est pas ça le courage, on fait malgré tout, rien de plus.
Autour de moi les gens ne me paraissent pas si touchés. Est-ce parce
qu’ils ne sont pas parisiens ? J’ai beau vivre ici depuis dix ans, je me sens
toujours parisien quelque part. Identité fictive, je serais incapable de vivre
à Paris de nouveau. Mais les souvenirs sont là, les petits bateaux colorés dans
les bassins des Tuileries, le musée de la marine avec mon père et mon frère, le
patin dans la rue avec les copains, les cinés avec ma femme à Bastille le
dimanche soir.
Je me surprends à regarder les Arabes. J’ai envie de me gifler.
vendredi 20 novembre 2015
Démonstration 13
Les attentats se
produisent alors que je mets sur le blog une série sur les monstres.
Forcément je fais le lien.
En médecine, on
distingue les maladies aiguës, qui tuent rapidement (comme le
choléra), et les maladies chroniques, avec lesquelles on peut vivre
longtemps (comme le diabète).
Je fais la même
distinction concernant les monstres. Les types qui vendredi dernier
ont pressé la détente sont les monstres les plus aigus, les plus
visibles.
Derrière eux se
cachent des monstres moins voyants : les imams fanatiques, les
formateurs de Daesh, tous ceux qui tirent vers la haine des gens
souvent simplement paumés. Eux, les gourous sectaires, sont des
monstres plus chroniques.
Un peu moins
aigus encore, on trouve les dirigeants d’extrême-droite :
moins virulents, ils n’appellent pas au crime mais ils répandent
la haine au quotidien. Ils sèment des violences à venir, sur le
terreau des désespoirs. Et ils profiteront probablement des
attentats lors des élections de décembre.
Mais le monstre
le plus chronique est aussi le plus insaisissable car nous baignons
dedans : c’est notre mode de vie. La propriété à outrance,
la consommation n’ont pas de sens. Le sens de la vie, ce sont les
liens qu’on a les uns avec les autres, ce sont les projets qu’on
met en œuvre. Derrière ce mode de vie, certains se nourrissent du
profit à court terme et courent après une réussite individuelle
qui ne tient pas compte de l'humain. Sont-ils des monstres ou juste
des idiots ?
Dans notre mode de vie, il y a aussi les portes fermées. En France,
la reproduction sociale est écrasante : sauf exception, les
enfants d’ouvriers deviennent ouvriers, les enfants de cadres
deviennent cadres. Et on ne donne pas le droit à l’erreur. Comment
s’étonner que les plus perdants à ce jeu, les désespérés,
tombent dans le précipice ?
Ce monstre-là,
notre mode de vie, nous le connaissons tous, nous vivons avec lui
chaque jour, c’est lui notre diabète. Les attentats en sont la
conséquence, comme des complications.
Personne ne naît
monstre. C’est la frustration, le désespoir et les mauvaises
rencontres qui changent les gens en monstres. Donnons un sens à la
vie, donnons vraiment sa chance à chacun et les recruteurs de Daesh
ne trouveront plus de recrues.
Ce ne sont pas de
petits changements qui sont nécessaires pour ralentir la fabrique
des monstres.
mercredi 11 novembre 2015
Démonstration 11 - Compas
Micks
a décidé de sauter le pas. Il était plutôt réticent, il trouvait
ça pas naturel et assez dégueu. Mais tous ses copains l'ont fait,
les jambes et même, pour les plus audacieux, des ailes. Tous lui
disent que c'est incroyable, qu'ils ont des sensations
extraordinaires. Micks les voit bondir comme des sauterelles, planer
du haut des tours. Il se laisse convaincre, il veut être comme les
autres. Il prend rendez-vous à la Clinique du Surhomme.
L'opération
se passe bien. Ses moignons sont bien formés, pas de syndrome du
membre fantôme. Ses prothèses sont belles, même si Micks ne roule
pas sur l'or. Après les trois semaines de convalescence, il peut
s'élancer à son tour. L'ivresse est fulgurante. Il court comme
jamais, bondit comme un félin.
Il
s'amuse des mois durant. Puis il s'habitue. Il en vient à se
demander comment il vivait avant. Pendant ce temps, certains de ses
potes se font les bras, certains même un œil.
Micks
les regarde. Ça lui fait envie mais il hésite encore. Il ne pensait
pas recommencer si vite. Il manque d'argent. Il se dit qu'après les
bras, il faudra autre chose. Il ne voit pas de fin.
Il
rumine pendant des mois puis, un jour, il finit par se dire que c'est
bien vain, qu'on doit se satisfaire du corps qu'on a. Ses jambes sont
déjà presque obsolètes, elles ne sont pas compatibles avec les
derniers prothextes. Il regrette son amputation. Il se trouve puéril
et stupide. Un matin, il les jette de rage.
Il
prend une chaise roulante. Dans la rue, les jeunes le fixent comme
une bête curieuse. Certains vieux sont plus compréhensifs et lui
adressent la parole, lui demandent s'il est trop pauvre pour acheter
des prothèses. Il répond : je n'en veux pas. Ils sont surpris
mais certains presque attendris se dévoilent, partageant
l'incompréhension des mutilations volontaires.
Un
jour, il croise son chirurgien. Bonne âme, ce dernier lui offre une
paire de prothèses. Micks refuse. Il lui dit : je préfère les
escarres au cul qu'à l'esprit. Le chirurgien est très choqué. Il
lui dit d'abandonner alors ses lunettes et sa chaise roulante.
Micks
rejoint le camp des naturistes radicaux, désormais en conflit ouvert
avec les prothètes.
samedi 7 novembre 2015
dimanche 1 novembre 2015
vendredi 23 octobre 2015
Démonstration 8 - Canis Lupus
dès
le tournant du midi
je
sais que la nuit revient
la
lune pleine au ciel pâle
entre
chien et loup
le
crépuscule s'avance
je
suis encore brisé
de
la fureur de la veille
entre
chien et loup
Il
est là ! il est sur moi !
il
me dévore, il m'enjambe
il
me traîne encore une fois
entre
chien et loup
dimanche 18 octobre 2015
Démonstration 7 - CQFD
Henri
est un petit garçon pâle, aux genoux cagneux. Il ne court pas vite,
toujours le dernier choisi pour les équipes de foot. Il n'aime pas
ça.
Il parle peu. En classe, il se met près du mur. Certains professeurs n'ont jamais entendu le son de sa voix. Il vit dans la lune. Ce monde l'intéresse peu, il est comme en transit. Par hasard, il a lu dans un livre : « Je considère la vie comme une auberge, où je dois rester jusqu'à l'arrivée de la diligence pour l'abîme. » Ça le fait sourire : il n'est pas si déprimé mais, comme l'écrivain, il comprend mal l'agitation des autres, toujours en train de préparer des coups, des recettes mal fagotées du quotidien. Lui flotte dans un univers beaucoup plus fluide.
Monsieur Simon, professeur de géométrie, est le seul qui l'a remarqué. Dès la première composition, il sent un esprit limpide, instantané. Il regarde mieux Henri, voit son profil d'enfant d'ailleurs. Il le prend à part et lui demande : « Aimes-tu la mathématique ? » Henri, sans le regarder, souffle : « Oui ».
Alors Monsieur Simon le prend par la main et l'emmène sur les sentiers irréels du raisonnement pur, les échafaudages vertigineux et incontestables, les raccourcis miraculeux. Ainsi Henri passe toute sa vie parmi les conjectures.
Il parle peu. En classe, il se met près du mur. Certains professeurs n'ont jamais entendu le son de sa voix. Il vit dans la lune. Ce monde l'intéresse peu, il est comme en transit. Par hasard, il a lu dans un livre : « Je considère la vie comme une auberge, où je dois rester jusqu'à l'arrivée de la diligence pour l'abîme. » Ça le fait sourire : il n'est pas si déprimé mais, comme l'écrivain, il comprend mal l'agitation des autres, toujours en train de préparer des coups, des recettes mal fagotées du quotidien. Lui flotte dans un univers beaucoup plus fluide.
Monsieur Simon, professeur de géométrie, est le seul qui l'a remarqué. Dès la première composition, il sent un esprit limpide, instantané. Il regarde mieux Henri, voit son profil d'enfant d'ailleurs. Il le prend à part et lui demande : « Aimes-tu la mathématique ? » Henri, sans le regarder, souffle : « Oui ».
Alors Monsieur Simon le prend par la main et l'emmène sur les sentiers irréels du raisonnement pur, les échafaudages vertigineux et incontestables, les raccourcis miraculeux. Ainsi Henri passe toute sa vie parmi les conjectures.
dimanche 11 octobre 2015
Démonstration 6 - Chimère
Dans
le noir
sur cette dalle
j'attends.
Vent glacé
février haineux
trois minutes
encore.
Mes pieds gèlent.
Je le vois arriver, loin
au débouché d'un souterrain,
il vient lentement
sinuant dans les arbres métalliques
sur une trace comme un limier
truffe au sol.
Comme il s'approche,
il grossit
il s'étire sur des centaines de mètres
ses écailles brillantes
guirlande tortueuse.
Éloignez-vous s'il-vous plaît.
Il est tout près maintenant
glisse lentement
caressant le rebord de pierre.
Il m'a vu
il me fixe
de ses gros yeux ronds
il est sur moi
sa tête passe à quelques mètres
longuement
le vacarme de son souffle presse mes oreilles
puis il pousse son cri
vrille sous la voûte crânienne
enfin il s'arrête
et crache un soupir.
Le dragon-fer
chimère électrique
s'ouvre
de ses entrailles tombe une lumière jaune
Destination Paris-Montparnasse.
sur cette dalle
j'attends.
Vent glacé
février haineux
trois minutes
encore.
Mes pieds gèlent.
Je le vois arriver, loin
au débouché d'un souterrain,
il vient lentement
sinuant dans les arbres métalliques
sur une trace comme un limier
truffe au sol.
Comme il s'approche,
il grossit
il s'étire sur des centaines de mètres
ses écailles brillantes
guirlande tortueuse.
Éloignez-vous s'il-vous plaît.
Il est tout près maintenant
glisse lentement
caressant le rebord de pierre.
Il m'a vu
il me fixe
de ses gros yeux ronds
il est sur moi
sa tête passe à quelques mètres
longuement
le vacarme de son souffle presse mes oreilles
puis il pousse son cri
vrille sous la voûte crânienne
enfin il s'arrête
et crache un soupir.
Le dragon-fer
chimère électrique
s'ouvre
de ses entrailles tombe une lumière jaune
Destination Paris-Montparnasse.
mercredi 7 octobre 2015
dimanche 4 octobre 2015
samedi 26 septembre 2015
mercredi 23 septembre 2015
dimanche 20 septembre 2015
samedi 12 septembre 2015
Pizza 17 - L'avocat
Erminio reste muet. Elle entre, ferme la
porte derrière elle et lui redemande :
– Qu'est-ce
qui ne va pas ?
Il la regarde crispé et dit :
– Tu
n'es pas venue
en
scorpion ?
– Hein ?
Il lui raconte sa vision de l'autre nuit
et lui montre le couteau à roulette. Elle essaie de compatir mais
arrive à peine à parler tant elle rit. A la voir, il finit par rire
aussi.
Il lui demande pourquoi elle est venue.
Elle reprend son sérieux et répète :
– Il
faut qu'on parle.
– Ah
oui.
– Tu
sais pourquoi je t'ai planté
il y a un mois ? demande-t-elle de but en blanc.
– Non.
– Moi
non plus. Enfin je crois que j'en ai eu marre de nous deux. Je
voulais changer. Ça fait quatre ans qu'on est ensemble, je n'ai
pratiquement connu personne d'autre. J'ai eu un doute. Et dès que je
me suis retrouvée seule, eh bien, je me suis retrouvée seule.
– Oui.
– Je
me suis retrouvée vraiment seule, tout au fond. J'avais des gens
autour de moi, mais personne ne me comprenait vraiment.
– Justement
je ne te comprends pas.
– Quand
je fais le scorpion ?
– Non,
tout le temps, répond-il en souriant. Je n'ai pas compris pourquoi
tu es partie, je n'ai jamais compris ton demi-sourire.
– Quel
demi-sourire ?
– Comme
ça, imite-t-il. Celui que tu fais quand tu ne réponds rien.
– Ah.
Ça c'est quand je ne sais pas quoi dire, je crois.
– Pourquoi
souris-tu alors ? Pourquoi tu ne dis pas simplement « Je
ne sais pas quoi dire ».
– …
Je ne sais pas quoi dire.
– Tu
progresses.
– Je
fais des efforts.
Elle reprend :
– Et
toi, pourquoi tu ne m'as jamais demandé ?
– Je
ne sais pas. J'avais peur d'avoir l'air idiot.
– Ce
n'est pas idiot de poser des questions. Ça montre qu'on s'intéresse.
Il se tait.
Brusquement, elle lève les yeux vers
lui :
– Je
voudrais qu'on se remette ensemble.
Il ne répond pas. Après quelques
instants, il se lève en marmonnant :
– Je
ne sais pas quoi dire.
– Je
promets de ne plus te quitter, de ne plus venir t'embêter à ton
travail, de ne plus t'attaquer
en scorpion la
nuit.
– Ce
n'est pas ce qui m'a le plus gêné.
– Qu'est-ce
qui t'a le plus gêné ?
– Moi
aussi je me suis senti seul. Moi aussi j'ai été avec toi quatre
ans. Je me suis retrouvé complètement à poil. Au point de tomber à
l'arrêt au feu rouge.
– Tu
préfères l'étreinte du scorpion à la solitude ?
– Ce
n'est pas la solitude, c'est d'avoir un oursin dans le ventre toute
la journée qui est pénible.
– Je
promets de ne plus te mettre d'oursins dans le ventre.
– Merci.
Elle se tait. Ses yeux brillent.
Il la regarde. Il la prend dans ses
bras. Elle met son visage dans son cou. Il tremble.
Elle souffle :
– Je
suis contente.
– Tu
as bien plaidé ta cause.
– Je
serai bientôt avocat.
– Tu
fais l'avocat, je fais la pizza, comme ça c'est bien.
Balise fournie par Rémi : avocat
Inscription à :
Articles (Atom)