Longtemps, je me suis
couché tard. J'ai toujours craint le crépuscule, cette heure sourde où tout bascule. Plus rien n'est ce qu'il semble être
habituellement, ce qui était familier devient étranger.
Aussi, dès le déclin
de l'après-midi, je cessais toute activité pour me plonger dans un
bain brûlant, proche de m'ébouillanter, avec un prix Nobel de
littérature. Contre les kriss de l'angoisse je brandissais un
bouclier de papier.
C'était vain. Quoi que
je fisse, la tombée de la nuit me sautait à la gorge comme un
carnassier. Entre chien et loup, je sentais toujours les mêmes crocs
dans ma chair.
Plus tard, je commençai
à boire. Avec mon Nobel je m'envoyais un grand cognac sans âge.
Ainsi chauffé du dehors comme du dedans, je ramollissais ma carcasse
et passais, tant bien que mal, le seuil fatidique de la nuit.
Une fois entré, je m'y
sentais si bien que je voulais qu'elle n'eût pas de fin. Je me
perdais dans des fêtes éblouissantes. Mais l'aube finissait
toujours par arriver et, de toute sa beauté, elle me signifiait avec
limpidité que j'avais encore brûlé mon temps en vain et que les
vapeurs de l'ivresse ne comblent pas la vacuité d'une vie.
C'est quand je suis
mort que ça a commencé à aller mieux.
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