Haa ! Tout à ma joie, j'ai oublié de publier ici le petit texte de science-fiction qui a gagné le concours Usbek & Rica-ANDRA aux Utopiales il y a un an. Ça parle de déchets radioactifs et de licenciement. Fonce, tu vas adorer.
samedi 12 décembre 2020
vendredi 25 septembre 2020
Les baricades misterieuses de François Couperin
banc de notes serrées
en dents de peigne pincées
refrain, détour
retour à l'ouverture
variations, faux-semblants, prétextes
revenant au cycle émouvant
virée à vélo dans les brumes ensoleillées
un soir d'été dans la lande suspendue sur la mer
le mistere je l'ai
mais où sont les baricades ?
retour en vagues d'un passé que je n'ai pas connu
dimanche 14 juin 2020
14 juin 2020 - épilogue
Un mois après, où en sont-ils ?
On a bien déconfiné. Deux
week-ends à la plage, chaleur. Le climat reprend le devant de la
scène. On nous annonce un été du feu de dieu, sécheresse
et tout.
Je suis allé courir plus loin
que le bout de la rue, et faire des courses. Ils limitent le nombre
de clients dans tous les magasins, on fait la queue, c’est long.
Mais on respire. Je ne lis plus la presse, je soigne mon indigestion.
Les bars rouvrent. On va pouvoir
partir en vacances. On nous annonce la crise à grands cris. On revoit les amis.
On parle du syndrome de la
cabane : des gens ont peur de ressortir.
Depuis deux
semaines
je retourne au boulot, pas complètement pour faire
un peu quand même le
père de famille : les cours ont repris à petite vitesse et la
jeunesse passe du temps à la maison. On
va tirer comme ça jusqu’à la fin du mois, l’année scolaire
clabote à tout petits bouillons. La guerre de l’écran continue.
En fait on a passé deux mois et
demi devant. Tout peut se faire sur écran. Les réunions continuent
à se tenir en vidéo avec
le bureau d’à côté.
On
en
arrive à réfléchir à ce qu’on
pourrait
faire hors écran, histoire
de se dégourdir la rétine.
On ne connaît pas les chiffres
du décrochage. Certains collèges font revenir en priorité les
enfants en difficulté, d’autres laissent le choix. J’entends
parler de classes de soutien pour l’été, « vacances
apprenantes ». Et on ne sait pas comment va se faire la rentrée. Noël à distance, ça botte quelqu'un ?
Partout, on tient vaguement ses
distances, on met des masques dans les couloirs du boulot et dans les
magasins. Les enfants au collège et au lycée suivent des procédures
Tchernobyl. La vie reprend son cours mais on ne sait pas combien de
temps ça va durer comme ça. En attendant, je vais à Paris la
semaine prochaine .
Peut-être quelques bons
virus à récupérer dans le train, à voir.
L’Europe pourrait être en
train de faire un grand pas : j’ai pas tout compris, mais
l’Allemagne qui bloquait a fini par accepter qu’on s’aide
financièrement. Il faut bien que les
autres pays européens, qui sont ses
principaux clients,
aient de quoi la payer. Apparemment c’est un tournant. Peut-être
même un impôt européen à terme. C’est grâce au virus :
confinement, crise économique, dette européenne pour repêcher les
pays catastrophés.
Pendant ce temps-là, les
États-Unis et la Chine se regardent en grinçant des dents.
Maintenant que la diplomatie chinoise a sorti les crocs, on a deux
beaux blocs de connerie face à face. Mais
avec deux qualités différentes : la bonne connerie brute de
Trump, on ne s’en lasse pas, épaisse comme un steak texan, et la
connerie néo-impérialiste de la Chine, qui joue de la mandale en
pleine poire et du balayage vicieux. Il
y aurait une place pour l’Europe là-dedans.
C’est déplaisant mais on pourrait bien être le seul bloc
un peu humaniste à
l’échelle mondiale. Et
on pourrait aussi apporter notre contribution en connerie
bureaucratique et percluse d’histoire, y a pas de raison.
L’épidémie flambe en Amérique
latine. Le Brésil est le deuxième pays avec le plus de morts. Les
chiffres officiels sont grossièrement sous-estimés. Les États-Unis
ont dépassé les 100 000. La France reste en-dessous des 30 000.
Est-ce que c’est fini pour nous ce coup-ci ? Certains parlent
d’une deuxième vague à l’hiver prochain. Et on nous annonce des
retours de pandémies, grippe sauvage mondiale tous les ans. Au moins
on est prévenu.
dimanche 10 mai 2020
Jour 55
C’est la
fin des confitures. On sort du tunnel mou et on recommence à regarder la date. Dès
demain c’est robe à crinoline pour tout le monde, pour garder sa distance.
Beaucoup de
choses pour ce dernier jour de bocal.
Résultats
à ce jour : États-Unis 80 000 morts, Angleterre 32 000, Italie
30 000, Espagne et France 26 000. On y
reviendra après la deuxième vague.
Ça peut
faire un peu peur maintenant de déconfiner, mais à un moment il va falloir recommencer
la vraie vie. Enfin c’est
pas pour tout de suite : deux nouveaux foyers de virus détectés en France.
Quarantaine pour les positifs et leurs contacts. C’est le nouveau régime.
L’Allemagne,
qui n’a pas vraiment confiné et a relâché la pression, voit son taux de contamination
remonter à 1,1.
La Belgique
a inventé un truc à la belge : chaque foyer de quatre personnes peut
choisir un autre foyer de quatre personnes, qu’il sera autorisé à voir pendant
la période qui s’ouvre. Il s’agit de blocs, on ne peut pas choisir des
personnes qui vivent à des endroits différents. La relation est exclusive, c'est-à-dire
que les deux foyers sont en binôme et ne voient personne d’autre. Compliqué
pour les familles recomposées.
Par ailleurs,
dans ce groupe de huit personnes, il faut une répartition identique à celle du pays,
soit à peu près cinq Flamands pour trois Wallons. Si c’est possible d’intégrer
un morceau d’une personne germanophone, c’est mieux, mais c’est pas obligé. Quand
tout ce petit monde se retrouve, le temps de parole doit être réparti selon
la même clé. Et les réunions doivent se dérouler alternativement en Flandre et en
Wallonie, avec là encore une réunion sur quinze dans le territoire germanophone
du Nord-Est si c’est possible mais c’est pas obligé.
C’est
vrai que c’est gai l’infox, je comprends que les salauds en raffolent. Cela dit
le premier paragraphe est vrai.
Petit bilan
littéraire puisque c’est l’heure : j’ai déjà tenu des journaux mais jamais
si longtemps ni en publication directe. Le plus difficile a été de tenir la
distance : il faut des choses à raconter, et assez vite la routine s’est
installée, il n’y avait plus grand-chose à dire sur l’intérieur du bocal. Tout ça
a donc viré à la revue de presse subjective. Et il a fallu mettre chaque jour de
l’énergie et entre une et deux heures. Il y a eu des après-diners laborieux.
Il a
aussi fallu garder le même ton sarcastique et le style expéditif. Pas toujours
facile mais c’était intéressant de tester cette plume-là, façon envoie comme ça
vient. Ponctuation réduite, expression proche de l’oral, sans trop d’égards
pour les bonnes manières linguistiques.
Et de
mettre à lire sans laisser reposer. Prise de risque un peu.
Sans
doute la lecture ne sera pas la même dans quelques années. C’est surtout pour
ça que je m’y suis mis : prendre une pipette de chaque jour pour conserver
l’ambiance, les sujets brulants et leur évolution au fil des semaines. Si ça
marche, en relisant on aura l’impression de prélever une carotte de glace comme
en Antarctique.
Il y aura
peut-être encore quelques entrées dans ce journal si certains évènements l’appellent.
Encore une fois rien n’est sûr.
En tout cas
merci à toi d’être arrivé jusqu’ici.
samedi 9 mai 2020
Jour 54
Après m’avoir
affiché une pub pour un jeu post-apocalyptique (jour 14), mon téléphone m’en file
une pour un masque trop stylé avec un imprimé calavera. Même avec des fleurs, une
tête de mort en ce moment il fallait y penser.
Quelques éléments
de bilan avant la fin des émissions. L’épidémie a montré que, quand c’est le
bazar, on est content d’avoir un État à peu près organisé et honnête. D’ailleurs
tout le monde est tout ouïe : audiences de malades pour télé-Manu et les
points santé du soir.
A contrario,
voir États-Unis, Russie, Brésil, Chine.
On constate
en passant que les ambiances autoritaires supportent mal les messages
désagréables : sale temps pour les lanceurs d’alerte, toubibs chinois
matés, commandant de porte-avions américain débarqué. Toujours casser le
thermomètre quand il annonce de la fièvre. Trop malin en période d’épidémie.
Ici la frousse
de la maladie est passée rapidement. On s’est vite retrouvé à gérer un nouveau quotidien
plutôt que des peurs existentielles.
J’avais
vu passer le type qui a couru le marathon sur son balcon de sept mètres, maintenant
j’apprends qu’un autre marsupial s’est carrément fait un ironman sur place :
4 km de natation dans son bassin à contre-courant, 120 km sur son vélo d’appartement,
un marathon en tapis roulant. Le voyage, c’est dans la tête.
On a un djeun
qui retourne en cours le 18, l’autre peut-être le 25. Ou pas. Ou à mi-temps.
Qu'est-ce
qui nous attend dans cette période à venir ? Déjà ça va durer. Et des changements
de rythme réguliers : école pas école, confinement déconfinement
reconfinement redéconfinement rereconfinement si on est en forme, télétravail
total partiel fini total partiel. Télévacances ? Beaucoup d’incertitude. Mourir
pas mourir. Des chiffres aussi. Elections municipales. Une sociabilité malmenée,
surtout si ça dure. Ça va être long à reconstruire ça.
A l’asymptote,
retour à la situation précédente mais pas vraiment non plus : vélo, mesures
vertes pour relancer l’économie, relocalisation de certaines activités cruciales
médicaments masques alimentation, télétravail un ou deux jours par semaine pour
tous. Des gens vont vivre à la campagne. Tout un système pour gérer les
prochaines maladies de chauves-souris : stocks, recherche en virologie,
suivi de patients, coopération à l’OMS. Tensions États-Unis-Chine. Néo-guerre
froide ? Réélection de Trump en novembre ? Et que fait l’Europe dans
tout ça ? Explosion de la zone euro parce que divergences économiques après
la crise ? Serrage de coudes car les ennuis nous ont rapproché ?
Rien n’est
sûr.
Inscription à :
Articles (Atom)